A l’heure où les annonces autorisant à célébrer de nouveau de belles cérémonies de mariage se font encore attendre, je voudrais partager avec vous cette belle légende du bout du monde, qui invite à la patience, qualité fort utile en ces temps particuliers !
Cette fois, je vous emmène sur les îles du Vent, dans un petit archipel des îles de la Société, en Polynésie française, en plein cœur de la culture maori : à Tahiti. Ces îles magnifiques, pétries de légendes et de mysticisme regorgent de belles histoires à raconter.
© photo : Tim McKenna Photography
Celle-ci commence il y a très, très longtemps, à Paea, une région de Tahiti Nui, la grande île, où vivait un couple mythique, très amoureux. Bien que les dieux soient contre leur union, Te vahine (« La femme ») et Taaroa (« l’ancêtre de tout ») s’aimaient tendrement. Alors les dieux décidèrent qu’ils ne pourraient avoir qu’un seul enfant, et qu’il leur serait enlevé lorsqu’il atteindrait l’âge de 6 ans. Cette décision, cruelle, fut gardée secrète.
Quelque temps plus tard, Te vahine mis au monde une merveilleuse petite fille à la beauté saisissante. Si belle et si douce, qu’ils lui donnèrent le nom de Te vahine moea i te’o pua rau : « La femme endormie dans le jardin des fleurs ». Je vous l’accorde, c’est joli, mais c’est long et peu pratique quand on doit appeler son rejeton pour passer à table, ou quand on vient de s’éclater le pied sur un jouet qui n’a pas été rangé ;-)
Te vahine et Taaroa n’eurent pas d’autre enfant, mais leur délicate fillette les comblait de bonheur. Et leur vie, consacrée à faire le bien autour d’eux, distribuant gentillesse et générosité à tous, les satisfaisait pleinement.
Le temps passe vite lorsqu’on est parent. Te vahine moea i te’o pua rau (vraiment, c’est interminable ce nom…) grandissait à vue d’œil, s’épanouissant comme les plus belles des fleurs de cette île paradisiaque, et faisant la joie de ses parents.
Et puis, le jour de ses 6 ans, elle disparut.
(Ne faites pas les étonnés, je vous l’avais dit !)
Te vahine et Taaroa la cherchèrent partout, sans relâche. Pas la moindre trace de leur trésor… Désespérés, ils allèrent consulter un tahu’a (« celui qui voit, celui qui sait »). Entre chamane et guérisseur, chef spirituel et homme de sciences, le tahu’a a un lien particulier avec le monde des Esprits et a accès aux murmures des dieux.
Le tahu’a leur apprit la prophétie qui les frappait. Il leur révéla également que leur fille avait été transformée en fleur, quelque part sur l’île. Une fleur unique, à l’odeur inégalable, d’une couleur surprenante : une fleur verte. Ah. C’est-à-dire que retrouver une fleur sur Tahiti, et spécialement une fleur verte, ce n’est pas une mince affaire. Et comment rompre le sort ?
Le tahu’a leur redonna espoir : le sortilège pourra être brisé, mais seulement par un homme capable d’une patience exceptionnelle. Je sais, je sais, je vous entends d’ici : les hommes… la patience… c’est pas gagné ! Alors je vous réponds : cliché !
Bref, Te vahine et Taaroa parlèrent de leur infortune à tous les hommes de leur connaissance. Et, qu’ils soient motivés par la beauté de la jeune fille disparue, ou par la volonté de prouver leur grande patience, certains d’entre eux partirent à la recherche de la demoiselle. Aucun ne revint.
Cela dura quatorze ans…
Jusqu’à ce qu’un jeune homme du nom de (accrochez-vous, c’est pas mal non plus) Taaroa ha’iha’i te rouru tarere (« l’homme aux cheveux longs ») décide de tenter sa chance.
Pas stupide, le prétendant au titre d’homme-à-la-patience-extraordinaire alla voir le tahu’a, histoire de recueillir quelques conseils avisés. Parmi ceux-ci, le tahu’a lui révéla que tous ces prédécesseurs avaient été changés en fougères. Il lui suffirait de les trouver, de chercher ensuite la fleur à proximité, puis de faire preuve de la plus grande des patiences…
Ni une, ni deux, Taaroa ha’iha’i te rouru tarere s’arme de son courage et de sa persévérance, et zou ! Direction la vallée de Hopa !
Arrivé dans une zone où la concentration en fougères était très inhabituelle, il ouvrit l’œil à la recherche de la fameuse fleur… qu’il ne tarda pas à trouver !
Bien. Et maintenant ? Faire preuve de patience…
Alors, il se plaça face à la fleur, débout, immobile, et attendit.
Il attendit patiemment, sans bouger, sans dormir ni manger, pendant cinq jours et cinq nuits ( les aventuriers de koh lanta à côté, c’est de la gnognotte…) !
Lors de la sixième nuit, la fleur exhalait de la fumée et un lourd parfum s’en dégageait. Il attendit encore… Jusqu’à ce que la fleur s’ouvre, laissant sortir Te vahine moea i te’o pua rau, âgée de 20 ans alors, et plus belle encore que tout ce qu’il aurait pu imaginer. Il tomba instantanément sous le charme ! Quant à la jeune femme, comment ne pas succomber au charme d’un homme capable pour vous d’une patience infinie ?
Quand ils retournèrent au village, une grande fête fut organisée en leur honneur, et puisque c’est une belle histoire d’amour, ils se marièrent, vécurent heureux, et eurent beaucoup d’enfants <3
On dit aussi à Tahiti que depuis cette histoire, les prénoms Te Vahine et Taaroa (la version courte donc) portent bonheur !
Si vous avez aimé cette légende, et si le thème polynésien vous inspire, sachez que le rituel du sable, très couru, est d’origine maori lui aussi… On s’en parle quand vous voulez ;-)
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